Lord Lucas Kendrick, Duc de Harndon, est certes un héros peu conventionnel, très froid, très apprêté, sophistiqué et charmeur en société, mais qui peut aussi bien se conduire en vrai mufle et piétiner les sentiments d'autrui. Il ne cesse de répéter à qui veut l'entendre, et à lui-même en premier, qu'il n'a plus de cœur (Titre VO : Heartless), et que rien ne lui importe à part sa sécurité intérieure.
Et pourtant, tout au long du roman, il ne cesse d'agir en contradiction avec cette profession de foi, se mariant dès les premiers chapitres alors qu'il s'était promis qu'on ne l'y prendrait pas, s'occupant des uns et des autres, les soutenant, les guidant, le plus souvent avec une grande maladresse, mais néanmoins avec constance et honnêteté. Repoussant l'amour de toutes ses forces, il se languit, sans trop en prendre conscience, d'une relation de confiance, de partage et d'amour. Meurtri par son passé de jeune homme doux, tendre et confiant, il devra réapprendre à s'aimer et à aimer les autres. Comme un instant magique d'ultime rédemption, la page sur la naissance de Joy, toute de simplicité et de grâce, me fait chavirer à chaque lecture...
Lady Anna Marlowe est vive, brillante, étincelante en société, et avide de plaisirs puisque à 25 ans, elle n'a jamais pu profiter de la vie, forcée à une vie de recluse et de sacrifices. Elle sait saisir chaque instant de bonheur et ne s’appesantit jamais sur les épreuves auxquelles elle doit faire face. Cet aspect du personnage uni, vibrant, solaire, comme souvent chez Mary Balogh, n'est bien sûr qu'une des multiples facettes d'un être plus tourmenté qu'il y paraît.
Anna, en réalité meurtrie, et avide de tendresse et d'amour, se tourne vers le Duc de Harndon, toute à l'illusion de ces premiers pas éblouissants dans les salles de bal. Car, sans que les héros le sachent vraiment, mais nous, nous le savons, c'est là le plaisir du lecteur, ils étaient destinés l'un à l'autre...
Voilà le scénario esquissé : deux êtres s'épousent, chacun pour de mauvaises raisons, chacun pour ses propres raisons, chacun destiné à parcourir un long chemin pour arriver enfin une parfaite communion avec l'autre.
Mon sentiment
Ce roman, je l'aime - trois lectures, chacune traversée par le même sentiment de bonheur.
Il y a toujours ces cheminements que j'apprécie, ces questions, ces hésitations, ces maladresses, ces ambiguïtés, ces heurts et ces gestes emprunts d'amour et de pardon. Les deux héros sont bien entourés de leur famille, très présente, très vivante, et l'on assiste à la rencontre d'Emily et d'Ashley, les deux héros du tome 2... une très belle collection de portraits secondaires avec laquelle on se sent vite à l'aise
Le suspens lié au secret d'Anna est aussi très bien ménagé, et c'est toujours avec la même indignation horrifiée que je lis les lignes qui retracent les souffrances passées d'Anna ( même au bout de 3 lectures) !
Je relirai sûrement ce roman, car il fait partie à présent de ma mythologie personnelle.
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