Mon Dieu ! Ce roman est tellement fort, tellement riche, tellement diaboliquement intelligent qu'il mériterait une étude à lui tout seul.
Si je veux broder dans le sens métaphorique du thème, je peux tout simplement dire qu'il m'a fait chavirer, submergée par des émotions très contradictoires. J'ai parfois bu la tasse, j'ai perdu pied, mais j'ai sacrément largué les amarres. Je pourrais continuer à l'infini, mais il suffira que je dise que ce roman ne m'a pas laissée indifférente.
Le canevas est filiforme pourtant : un homme, un femme, un bateau, une île déserte. Des mois de solitude. Et la survie.
Mais SURVIVING RAINE, ce n'est pas tant sauver Raine, c'est surtout survivre A Raine : car dans ce roman, tout prend sens, comme tout prend un double sens.
I survived abandonment, betrayal, endless violence, and the elements, but could I survive Raine?
Raine, celle qui (re)donnera la vie et l'espoir en sauvant son sauveteur, mais celle aussi par qui le danger arrive, car se donner à l'autre, c'est se mettre à sa merci et se rendre vulnérable. Raine, qui porte le nom de cette pluie salvatrice, la sauveuse, la lumineuse Raine qui lui dira :
My favorite thing about you is your incredible will to survive.
Surviving Raine, c'est, dans un mouvement très parabolique, un long cheminement vers la rédemption. L'histoire d'un mort-vivant suicidaire qui se sauve lui-même en sauvant l'autre, cette femme qui lui est totalement étrangère. L'histoire d'un naufragé intérieur, volontaire, qui se raccroche à la vie par la grâce d'un naufrage qui intervient presque comme un geste divin.
Le héros est un ultra bad-guy, brutalement asocial, renfermé sur un monde intérieur pollué, violent dans ses actes, ses pensées et ses gestes, presque psychopathe et bipolaire. Un malade qui ne déparerait pas dans un hôpital psychiatrique. Un meurtrier meurtri par une vie infernale, une véritable machine à tuer. Un rebut de l'enfer. La lie de la terre. Habité par "that nasty, evil part of me". Inaccessible, intouchable, "unlovable".
C'est un survivant au premier sens du terme, qui ne doit d'être en vie que par sa capacité à éliminer les autres. Le dernier. Un survivant qui se noie dans l'alcool. Et un pécheur qui repêche Raine, in extremis.
Or ce héros n'est pas tout d'une pièce. Lui aussi présente plusieurs facettes.
Car cet homme est purement fascinant.
Ce pécheur cite des vers du Paradis perdu de Milton, et il ne rêve que d'y vivre jusqu'à la fin de ses jours, dans ce paradis trouvé au bout d'un naufrage.
Ce fou furieux pleure comme un enfant sur sa solitude, c'est un écorché vif, à la sensibilité à fleur de peau, aux nuits hantées. Il n'a plus la parole, on la lui a toujours déniée, si bien qu'il n'a survécu que par ses prouesses physiques et mentales.
Or le pardon passe par le chemin de la parole. Cette faculté de parler que Raine, constante, ne cesse de solliciter. En lui donnant la parole, elle lui apprend aussi le don de soi, le sens de la confession, pour parvenir au pardon. Au pardon de ses propres carences. De toutes ses nombreuses fautes. Bastien se dévoile enfin. Il lui dit tout. Se confesse, se met à nu. Comme elle se mettra à nu devant lui.
Raine le lave de ses péchés. Car la rédemption, celle qui le mènera de l'enfer au paradis, se nomme Raine. Leur paradis (re)trouvé, spatial, mental et affectif. La leçon de survie ultime, c'est que, quelque soit le lieu, Elle est son paradis, sa sérénité, elle est "a chance at love. A chance at life".
"You gave me something... no, someone... to live for. There was no reason for my existence before you."
Cette vision du héros masculin m'a d'ailleurs énormément rappelé le Gabriel de Judith James dans Broken Wing, un homme brisé lui-aussi par la vie, suicidaire et asocial.
Ce chien perdu, violent et maltraité, sera maîtrisé, apprivoisé, adopté. Il trouvera dans les yeux de Raine le don de soi, la confiance, la valeur. Le sauveteur sauvé.
Someone finally tamed Sebastien Stark.
Cette lecture restera longtemps, je pense, dans ma mémoire comme une expérience inoubliable. Je me suis vue catapultée d'un extrême à l'autre pendant pratiquement tout le voyage. Tiraillée par des émotions violentes et contradictoires : la répulsion, l'éblouissement, la frayeur, l'admiration, la joie, la pitié.
Quel talent ! Quel exercice de style ! Tout le roman tient dans un huis-clos, à part les deux chapitres qui l'ouvrent et qui le ferment. Le monde extérieur, "normal", est vu comme des parenthèses, tandis que le plus important va se jouer dans ces bulles hors du temps et hors de l'espace que sont ces lieux circonscrits : le radeau de survie, l'île. La survie de chacun, la vie. L'interdépendance.
Moi qui d'habitude n'adhère pas vraiment aux romans subjectifs, j'ai adoré cette voix masculine. L'écriture de ce roman est carrément prodigieuse, ensorcelante. Rien n'y manque. Paradoxalement, malgré la dureté de certaines scènes, l'amour et la passion s'y expriment avec flamboyance, le développement des relations entre les héros tient de la magie, les scènes sensuelles sont à tomber.
Je crois que je vais m'arrêter là, mais je pense que ce livre va me poursuivre très très longtemps. Et je suis certaine que je le relirai. Plus d'une fois.
En clair, si vous êtes lectrices VO, LISEZ-LE.
MDR j'ai enfin réussi a trouver comment répondre sur ton blog ;) quelle blonde lol
RépondreSupprimerCe livre me fait super envie, j'espère qu'il sera traduit un jour :'(
Coucou Lilitth (de bdp?) ! Oui, ce serait le rêve, il aurait sûrement beaucoup de succès. Mais comme c'est de l'autoédition, il me semble que c'est plus difficile ! Rêvons un peu !
RépondreSupprimerOui, les com sont bien cachés sur ce blog ^^
A bientôt ;-))
oui de Bdp ;)
RépondreSupprimerOh tu viens de me briser le cœur :'( j'ai plus qu'a croiser les doigts ou a me mettre a l'anglais ;)